Juste ici, tu peux retrouver le premier épisode Bali épisode 1 : la piscine, le courage et la paisibilité
J’ai vécu à Uluwatu comme on vit dans une colonie de vacances. Je ne pouvais clairement pas rêver mieux, comme début d’expérience solo à l’autre bout du monde. Quand j’ai fait le choix de partir en vacances seule, je ne me suis pas jetée à corps perdu dans l’inconnu. Comme toujours dans la vie, j’aime bien faire les choses en douceur, à mon rythme. M’offrir des transitions, afin d’écouter ma tête et de ne pas me mettre dans des situations, où je risque de me sentir mal. C’est pourquoi, dans mes deux semaines et demi à Bali, j’avais réservé 5 nuits dans un Surf Camp. Un lieu où je savais à 99 % que j’allais rencontrer des gens.
Après quelques recherches sur les Internets, j’avais trouvé ce qui me correspondait : une maison sur une falaise, avec accès direct à la plage, cours de surf et de yoga. Chambres partagées à deux, donc ça réduit la possibilité de tomber sur un coloc qui ronfle. Le cadre cochait toutes les cases.
Je suis arrivée à Dreamsea vers 13h, en avance pour mon check-in. J’ai croisé quelques personnes, mais j’étais encore dans la réserve. Comme le premier jour de classe dans une nouvelle école. J’ai participé au cours de surf de 14h (pas le temps de niaiser par ici), que j’ai évidemment arrêté après 1h20. De retour sur la plage, je m’allonge sur ma planche en essayant de retrouver mes esprits, quand une fille surgit de nulle part et commence à me faire la conversation. C’était le début de la colonie de vacances.
J’ai rencontré des Hollandaises, une Autrichienne, des Anglaises, des Suisses, des Espagnoles… ça ne s’arrêtait pas. C’est drôle comme faire la rencontre d’une nouvelle personne, lorsqu’on est seule et à l’étranger, semble si évident. J’y ai beaucoup réfléchi, et je ne me souviens pas de la dernière fois où j’ai abordé un inconnu. Quand était la dernière fois, où je me suis présentée à quelqu’un, juste comme ça. Lorsque ça arrive dans les bars, c’est généralement après trois verres et je laisse les hommes faire le premier pas, suite à des eyes contact qui ressemblent à des appels de phare. Même au bureau, quand une nouvelle personne commence, je vais rarement me présenter pour faire connaissance. Je vis dans ma bulle avec mes personnages principaux et secondaires et même si j’adore me faire de nouveaux copains et découvrir de nouveaux humains, ça ne m’arrive pas si fréquemment. Mais ici, c’est différent et c’est normal, c’est la vie en auberge et en voyage. C’est tellement instructif.
En grandissant, tous les étés, ma mère m’a amené faire du camping. Pendant des années, faire la connaissance de nouvelles personnes, les aborder à la piscine, c’était facile pour moi. Avec l’adolescence, les choses basculent un petit peu. A 16 ans, je m’inquiétais du regard des autres, de paraître suffisamment bien. J’ai donc arrêté d’aller vers les inconnus, par peur (mais peur de quoi ?). J’ai pas mal travaillé là-dessus, dorénavant, je sais qui je suis, ce que je vaux et j’ai compris que les autres n’allaient rien y changer. Qu’il n’allait pas me détester si je ne disais pas ce qu’il fallait, que leur jugement n’avait pas à me toucher autant.
Alors dans cette espèce de colonie de vacances, je me suis fait pas mal de copains. Les questions basiques refaisaient souvent leur apparition. Tu viens d’où, tu as quel âge, quel est ton travail. En deux jours, je suis devenue copine avec des filles à peine plus jeunes que moi, vivant à Amsterdam. Lorsque j’ai parlé de mon travail à l’une d’elle, elle s’est écriée "You’re like Carrie Bradshaw !!!!" avant de répéter cette même phrase à plusieurs personnes "She’s a French version of Carrie Bradshaw !!!". Ma réaction a été de rire gênée et d’ajouter un "a cheaper version of Carrie Bradshaw". Je sais, je sais, je dois accepter les compliments, mais en même temps, dans quel épisode avons-nous vu Carrie porter des vans trouées, un sac jaune taché, avoir la peau bronzée par le soleil et les cheveux décolorés par la mer ? À la limite, j’accepte d’être la version Bali de Carrie Bradshaw.
Ici, lorsque j’évoque mon travail, les réactions sont toujours très positives (sauf le Français que j’ai rencontré en soirée, mais ça vaut une histoire à part entière). Après cette comparaison au personnage de Sex & the City, j’ai aussi eu droit à des regards admiratifs, à de nombreuses questions et à des réactions qui font du bien. En France, quand j’explique que je travaille pour un magazine féminin, j’entends plus souvent des moqueries, comme si ce n’était pas assez bien. De temps en temp, je repense à cette fois, où durant un date, le mec en face s’est complètement permis de juger mon métier, pendant 5 minutes, sans s’arrêter. Je l’écris pour ceux qui auraient besoin de le lire : peu importe votre job, que vous travaillez pour le gouvernement, que vous soyez jardinier, cuisinier, postier, journaliste pour un média féminin, peu importe votre emploi, le plus important, c’est que cela vous plaise. Et juger le travail des autres, ne rend pas plus intelligent. Mais essayer de comprendre ce qu’ils font, s’ils sont heureux, oui. C’est là toute la différence.
Durant ces 5 jours à Uluwatu, j’ai donc découvert trois choses : je suis (un peu) Carrie Bradshaw, je sais aborder les gens et me faire des copains, et je suis nulle en surf. Ok, découvert, c’est peut-être un grand mot, car je m’en doutais. Je n’avais surfé que deux fois dans ma vie, la première durant un week-end surf et yoga avec ma meilleure amie à Hossegor. Le cours avait duré deux heures, je mettais levée une ou deux fois sur la planche et j’avais eu des courbatures pendant trois jours. La seconde, l’été qui a suivi, j’ai voulu faire la maligne et louer une planche toute seule. J’ai principalement flotté, et arrêté au bout d’une heure. Donc me voilà à Bali, sur la plage de Padang Padang (celle que l’on aperçoit dans Mange Prie Aime), réputée pour ses vagues, à faire mes premiers pas sur une planche. Quelqu’un m’a dit "c’est absolument pas le bon endroit pour apprendre", yes, you’re right.
Le surf m’a toujours attiré. C’est assez drôle, j’ai grandi en fantasmant sur deux clichés de vie bien différents. D’un côté, il y a la working girl, qui travaille dans un magazine de mode, vit dans une grande ville, va à toutes les soirées et portent des vêtements incroyables. De l’autre, il y a la fille libre, blonde décolorée, toujours pieds nus, qui surfe le matin, regarde le soleil se coucher sur l’océan le soir. Pourquoi ces deux opposés m’ont ils toujours autant fasciné ? Je mise beaucoup sur les films et les séries qui ont travaillé mon imagination durant mon adolescence. Au final, je ne suis devenue ni l’une ni l’autre, j’ai brodé ma vie autour de choses que j’aime, et je me suis construite d’une façon qui me va bien. Un mix de tout ça et plus encore. Toutefois, le surf est resté un objectif, plutôt difficile à atteindre.
Alors me voilà au milieu de la mer, face à la plage de Padang Padang, essayant d’avancer avec mes petits bras très peu musclés. Je rame au mieux pour rejoindre le channel (que j’ai renommé Disney Chanel dans ma tête) et je me dis que clairement, je vais mourir. Oui, je suis dramatique, il faut s’y faire. A chaque cours (donc trois au total), j’ai expliqué au prof que j’avais peur, et que je préférais rester sur des petites vagues. Règle numéro 1 pour bien vivre avec soi-même : être honnête, il vaut mieux commencer bas et gravir les échelons, plutôt que de se dégoûter dès le début. Et je ne voulais surtout pas me prendre une planche dans la figure et terminer mon séjour le nez cassé. Je n’ai pas gravi beaucoup d’échelons, mais à chaque fois que je me faisais rouler dessus par les vagues, je me répétais cette phrase "meuf tu es en train de surfer à Bali c’est dingue" car oui, ça l’est, dingue. J’ai réussi à me lever quelques fois et à prendre quelques vagues, le sourire aux lèvres et un "youhouuuuuu" qui venait du fin fond de mon corps. Le dernier jour, après deux cours consécutifs à 6h du matin, ajouté à des cours de yoga, je n’avais plus aucune force. Alors que je me reposais sur le Disney Chanel, le courant m’a emporté et je me suis retrouvée au milieu des grosses vagues. Je n’ai pas fait la fière quand l’une m’a complètement renversé, retourné, secoué. Je ne suis pas mauvaise perdante et je sais accepter quand il faut arrêter. Alors j’ai simplement emprunté une vague retour direction la terre ferme. L’océan a gagné pour cette fois, mais la vie est longue, j’aurai ma revanche !
Le surf, c’est vraiment un sport de bâtard. Tu les vois sur leur planche, ils sont beaux. Les filles ont des corps élancés, même les enfants semblent danser sur les vagues. Pourtant, une fois que tu y es, que tu te jettes à l’eau, tu réalises que ce n’est pas une danse. Il ne suffit pas de maîtriser le guerrier deux au yoga et de savoir nager, il faut beaucoup plus que ça. De l’entraînement, certes, mais peut-être aussi du courage, de la confiance et un petit brin de folie. Un jour, je suis sûre que je réussissais à mettre tout ça sur ma planche, pour moi aussi, danser sur les vagues de Bali, ou d’ailleurs.
À Uluwatu, je n’ai pas écrit. Pourtant, le cadre était idéal pour ça. J’ai pris des photos dans des plages magnifiques, j’ai regardé le soleil se coucher, j’ai bu du café face à la mer, mangé des petits déjeuners très instagrammables. J’ai fait la fête, je me suis fait conduire en scooter, j’ai croisé quelques poules, des vaches, des singes. J’ai parlé anglais et quelques fois, j’ai dit des choses qui n’avaient aucun sens. J’ai fait une manucure, un massage, des fois seules, d’autres fois accompagnés, mais au bout de ces cinq jours, je n’ai pas eu tant de temps que ça pour moi. Ce qui me semble étonnant, puisque je voyage seule. J’ai donc quitté Dreamsea avec un pincement au cœur, car ce lieu est incroyable, mais aussi très contente, de voir autre chose, de rencontrer de nouvelles personnes et peut-être, d’avoir un peu plus de temps pour moi. Effectivement, la colonie de vacances c’est merveilleux, mais l’idée de voyager seule, c’était aussi de prendre le temps de me retrouver avec moi-même.
Après 5 jours à Uluwatu, je suis donc partie sur l’île de Nusa Penida. Et j’étais loin de me douter que le sentiment de solitude, allait se faire ressentir comme rarement auparavant.
La suite bientôt, j’espère que tu vas bien,
Des bisous,
Lauréna
et rendez-vous sur Instagram si tu veux voir mes aventures en images.
Quelle aventure ! 😎😘❤️